Propos préliminaires d’André TORRE qui vont être illustrés et exposés lors de son allocution avant les ruches matinales :
« On parle beaucoup de proximités aujourd’hui et ces dernières années : emplois de proximité, justice, police et démocratie de proximité, mais aussi commerce et économie de proximité… la liste est longue et fait penser que le terme est à la mode, voire constitue une notion émergeante et bientôt dominante du XXIème Siècle. En tout cas, c’est ce que laisse entendre un récent Rapport du Conseil Economique, Social et Environnemental.
Mais qu’est-ce que cette proximité, ainsi mise en avant ? Le terme est ambigu, puisqu’il fait aussi bien appel à la distance (je suis proche de mes voisins) qu’aux relations et sentiments (« mes proches »). Et cette dualité se retrouve également dans les travaux des chercheurs et les discours des politiques. On fait ainsi référence à la Proximité Géographique (il s’agit de la proximité physique, liée à la distance et aux infrastructures de transport) mais également à la Proximité Organisée (les proximités entre les membres d’un réseau, les participants d’une équipe projet, les anciens élèves d’une Ecole d’ingénieurs, les groupes de développeurs ou les communautés de pratiques sur Internet…), qui fonctionne dans le lointain et s’abolit des distances.
Le choix du lien Proximités et Innovations, qui est au cœur de la 10ème Journée de l’Economie, n’est pas innocent. Comme l’ont remarqué les décideurs et les chercheurs, beaucoup d’éléments laissent à penser que les deux sont fortement liées. On considère généralement que la proximité géographique facilite les interactions techniques et l’innovation : ingénieurs ou techniciens seraient beaucoup plus facilement en mesure de se comprendre, d’échanger des informations, de monter des projets et de construire de nouvelles compétences, en un mot de travailler ensemble au service de l’innovation, quand ils peuvent entretenir des relations quotidiennes ou très régulières. C’est la raison pour laquelle ont été mises en œuvres les politiques de développement local de l’innovation, avec les technopoles, puis les clusters ou les pôles de compétitivité par exemple.
Mais l’innovation n’est pas seulement technologique. Elle prend des formes diverses dans les territoires – sociale, organisationnelle, institutionnelle… – et conduit à différentes déclinaisons de la proximité. Ce sont les initiatives locales et leur accompagnement, qui définissent l’économie de proximité, avec ses circuits courts et ses modes financement locaux. Il s’agit aussi de l’économie circulaire et de la valorisation des ressources locales, qui met en évidence la circulation locale des marchandises et des flux. Ou encore de la question de la coopération des différents acteurs des territoires aux processus de développement : relations inter-entreprises, réseaux, groupes de travail et relations coopératives…
Mais les proximités ne peuvent être utilisées, mobilisées et valorisées que si l’on se confronte à la question de la gouvernance des territoires et de la participation des populations locales. Sans décision innovante, et sans l’accord des acteurs et leur implication dans les processus de décision, les chemins du développement sont fragiles, dans un monde aujourd’hui très concurrentiel. Il est nécessaire d’accorder toute leur importance aux processus de gouvernance territoriale et de s’assurer que l’innovation ne reste pas limitée au domaine technologique et concerne aussi les dimensions sociale, organisationnelle et institutionnelle. C’est à ce prix que l’on peut faire naitre, cultiver et mettre en musique les proximités, au service de projets de territoire impliquant fortement les parties prenantes locales, sans exclusion de la richesse des apports extérieurs. »
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